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13 juin 2013

Marrakech met en place une solution écologique pour irriguer ses golfs

Marrakech met en place une solution écologique pour irriguer ses golfs

Unique en Afrique et remarquable par son ampleur, la solution d’irrigation des golfs par les eaux retraitées de la station d’épuration de Marrakech est un modèle de développement durable.

La frénésie immobilière qui s’est emparée de Marrakech au milieu des années 2000, a ajouté aux trois golfs existants, 17 nouveaux projets en à peine cinq ans, lesquels pourraient ainsi en porter le nombre à vingt!

Un golf a la réputation bien fondée d’être un assoiffé. Un parcours de 18 trous haut de gamme, comme le sont tous ceux de Marrakech, irrigue en moyenne la moitié de sa surface, soit 30 ha sur une surface moyenne de 65 ha, pouvant aller jusqu’à 150 hectares pour un 27 trous de luxe. Compte tenu de l’ensoleillement et de l’évaporation dans la région, la consommation y a été estimée à un million de mètres cubes par an ! Vingt golfs, c’est tout simplement vingt millions de mètres cubes par an.

Soucieuses, de préserver la nappe phréatique, les autorités ont réagi et anticipé. L’impulsion est venue d’en haut, le souverain Mohammed VI ayant demandé que l’on s’occupe précisément du problème. La régie locale de distribution d’eau, la RADEEMA, a saisi l’occasion du projet de station d’épuration prévue par le schéma directeur, et alors en cours de lancement, pour intégrer cette nouvelle préoccupation.

Cette station d’épuration était devenue une nécessité. Les eaux usées de la ville dont la population a dépassé le million d’habitants, étaient intégralement déversées en quatre points de rejets dans l’oued Tensift et son affluent, l’oued Yssil. Elles étaient évacuées vers la mer, 150 km plus loin, par les crues d’un oued à sec en dehors de jours de pluie bien rares. Autant dire que ces eaux prenaient leur temps en chemin, et dans les 800 hectares de l’Oulja, la partie ouest de la Palmeraie, son épandage était même la base d’un maraîchage de proximité dont la dangerosité sanitaire, moins visible que les greens des golfs, était passivement tolérée par la population locale.

Le schéma directeur prévoyait à la base un traitement primaire et secondaire des 60 millions de mètres cubes d’eaux usées de la ville, soit un abattement de 60% de leur pollution, avant de les rejeter à nouveau dans l’oued Tensift. Un traitement tertiaire, allant jusqu’à 90% d’abattement de pollution, a été rajouté pour traiter 33 millions de mètres cubes et rendre cette eau appropriée à l’arrosage des espaces verts. Pour acheminer cette eau vers les vingt golfs existants ou en projet, il a fallu construire une conduite forcée de 85 km de long, un investissement de 486 millions de dirhams.

Si la régie a pris en charge une partie de l’investissement, les promoteurs ont été invités à mettre la main à la poche et participer à hauteur de 30 millions de dirhams chacun. Tous y ont souscrit. Parce qu’ils n’avaient pas le choix, la municipalité n’autorisant de tels projets que contre une participation aux frais de la station, mais également parce que la solution est économiquement intéressante. Ce golf de 27 trous en bordure de l’oued Tensift, en place depuis vingt ans, devait par exemple diluer les eaux saumâtres de ses puits avec de l’eau de ville achetée au prix fort ! Le prix de vente de la RADEEMA des eaux retraitées lui apporte aujourd’hui une solution intéressante.

Le dispositif est opérationnel depuis 2013 et aujourd’hui, les premiers golfs ont été connectés à la conduite et irriguent leurs greens et fairways avec les eaux usées. Les autres sont toujours en chantier et les 33 millions de mètres cubes d’eau de capacité ne sont utilisés qu’à hauteur de 5 à 6 millions de mètres cubes, soit moins d’un million de mètres cubes par golf.

C’est d’abord parce que les golfs ont fait des progrès dans l’utilisation de l’eau, utilisant des plantes plus adaptées au climat de Marrakech, notamment en lieu et place du traditionnel gazon anglais, des plantes grasses, des arbres sobres aux racines plongeantes et non plus , des techniques de distribution d’eau comme le goutte-à-goutte. Le million de m3 retenu comme base de consommation moyenne s’est révélé une surestimation.

Surtout, plus que les problèmes d’environnement, les problèmes économiques ont eu raison de l’empressement des promoteurs immobiliers. Les chantiers ont ralenti, tirant en longueur, et les golfs ne sont pas encore au rendez-vous.

La nappe phréatique a-t-elle obtenu un répit ? Pas réellement : la consommation d’eau des vingt golfs, avec ses 20 millions de mètres cubes potentiels par an, ne pèse rien par rapport aux 1600 millions de mètres cubes que mobilise toute la région, notamment son agriculture. Mais l’exemple est donné, de belle manière.

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