Le fil conducteur du 7ème WEEC est :
L’éducation à l’environnement et les enjeux d’une meilleure harmonie ville-campagne
Le thème est transversal : Villes et campagnes : En quête d’harmonie a une grande valeur environnementale et sociale et elle est totalement dépendante des relations de pouvoir (les classes urbaines et rurales, les relations Nord-Sud du monde, l’articulation des groupes de pouvoir économique) et du modèle de production et de consommation.
Cette question met également en jeu l’urbanisme, les styles de vie, la relation entre l’humanité et la nature, etc.
Au vu de sa transversalité, le fil conducteur:
1. fera l’objet de moments spécifiques dans le programme de la conférence (discours d’introduction, débats, expositions, forums).
2. ne sera pas traité comme un axe thématique en soi, mais plutôt comme une trame de fond (dans les «papers» et les autres « niches thématiques » du congrès)
A. Ville vs campagne. Les causes
Derrière le choix de ce thème, il y a le nombre croissant de population vivant dans les villes (plus de 50% / 200.000 personnes quittent chaque jour la campagne), ce qui induit les graves problèmes d’exode rural et le développement des banlieues.
Les causes de ce phénomène sont d’ordre socio-économiques, écologiques et culturels.
1. Socio-économiques : le travail agricole étant très peu rémunéré, les citoyens espèrent trouver dans la ville davantage de possibilités d’échapper à la pauvreté ; ils rêvent de bénéficier d’un ascenseur social.
2. Écologiques : le changement climatique (aux multiples conséquences : changement des cycles saisonniers, impacts sur la migration des animaux et des plantes, accentuation des phénomènes de catastrophes naturelles comme la sécheresse, la désertification, les inondations ou les glissements de terrain) cause la perte d’un sol fertile mais aussi le nombre croissant de réfugiés « climatiques » au sein des pays et entre les pays. Le changement climatique se greffe et amplifie une situation déjà détériorée par les phénomènes induit par l’homme tels que la déforestation, la destruction des habitats, la pollution, l’appauvrissement des sols à cause des produits chimiques et de la mécanisation, l’utilisation des réserves foncières (pour les infrastructures, les logements, les divertissements – par exemple terrains de golf etc.). Soulignons néanmoins que le secteur agricole est lui-même responsable de la pollution de l’eau et du sol (comme il nous a été enseigné il y a 50 ans par Rachel Carson dans Silent Spring : la production de la nourriture est à l’origine d’une proportion importante des émissions de CO2).
3. Culturels enfin parce que la ville offre davantage d’opportunités et de possibilités sur un plan culturel tandis que la ruralité est perçue comme inférieure. La «profession» d’agriculteur (ou de berger ou de forestier) ne bénéficie pas d’un grand prestige aux yeux des «citoyens» et donc de la culture dominante (aujourd’hui mais aussi dans le passé).
B. Les conséquences
La plupart des grandes villes et des métropoles sont concentrées dans les pays en voie de développement et émergents, bien que ce soit dans des continents comme en Europe que le pourcentage de la population urbaine atteigne les plus fortes proportions.
Cette urbanisation et sub-urbanisation traduisent par une congestion des zones urbaines, où sont de plus en plus présents des problèmes liés à la violence, à la pollution. Les effets de congestion sont amplifiés par l’augmentation des déplacements entre la maison et la ville, considérée comme un lieu de travail, de consommation ou d’offre culturelle (on parle d’ « usagers de la ville »).
L’urban sprawl, (modèle « américain » d’étalement urbain) est devenu un phénomène mondial. Les plus chanceux trouvent dans ces banlieues périphériques et ces villes satellites un domicile qui coûte moins cher, une vie plus tranquille, de meilleures conditions environnementales, avec, peut-être, l’illusion d’une proximité vis-à-vis de la nature.
A l’opposé, pour des centaines de millions de pauvres, la migration urbaine signifie se blottir dans les favelas, les bidonvilles, les villages caractérisés par l’absence de services, la violence, la dégradation, la criminalité, les mauvaises conditions de vie (en 2010, les habitants des bidonvilles – slums – étaient 827,6 millions, soit une augmentation de 55 millions depuis 2000 – NU-HABITAT, 2010).
Parallèlement à ces mouvements urbains, dans les zones rurales, le vieillissement de la population est un phénomène de plus en plus récurrent, en raison du faible renouvellement générationnel du monde agricole (les jeunes préférant migrer à l’intérieur du pays ou à l’étranger). Tandis que la population urbaine augmente, la population rurale diminue avec des mouvements de dépeuplement ou d’abandon des villages.
Souvent cet abandon contribue à la dégradation des sols, suite à la cessation de l’entretien des forêts, des rivières, des terrassements, etc…
C. Les grands défis
La question de la relation entre zones urbanisées et zones rurales et naturelles doit être évidemment déclinée en des termes partiellement différents selon les diverses parties de la planète, mais il n’en demeure pas moins qu’il s’agit aujourd’hui d’une question centrale puisque les trois grands défis de l’humanité sont:
• l’eau;
• l’alimentation;
• l’énergie.
Ces trois grands défis se gagneront ou se perdront aussi bien dans la ville qu’en dehors de la ville.
Le monde rural est également appelé à un engagement fort, auquel il ne pourra faire face sans la mise en place de politiques transversales capables de saisir les interconnexions entre tous les aspects du problème et la nécessité d’une approche intégrée.
L’urgence est:
• d’arrêter (et si possible d’inverser) l’exode rural en donnant de la valeur et une vraie qualité de vie à la vie rurale, en luttant contre la pauvreté des populations rurales, en protégeant les paysages et en arrêtant la surconsommation du foncier stratégique.
• d’améliorer la qualité de la vie des zones urbaines et de favoriser un développement durable pour les villes.
Les solutions passent principalement par:
1. Une transformation radicale de l’urbanisme et une nouvelle façon de concevoir les villes:
• la réponse environnementale est la «densité» plutôt que l’étalement urbain (sprawl),
• le développement du capital social et de la participation,
• le développement de services publics efficaces qui rendent les villes «durables»,
• le développement d’activités agricoles au sein des villes (potagers urbains et périurbains comme une forme d’autosuffisance alimentaire partielle, mais aussi facteur de participation et de réappropriation de l’espace).
2. Un changement profond dans l’utilisation du territoire et dans l’organisation du système alimentaire dans sa globalité (le «système alimentaire» désigne ici toute la chaîne de production, de la transformation, de la distribution, de la consommation de la nourriture et l’ensemble du réseau complexe de relations que la nourriture tisse à tous les niveaux – écologique, social, culturel, économique).
3. Le développement d’une « agro-écologie », c’est à dire d’un système alimentaire qui respecte les limites et les équilibres fragiles de la planète.
4. Un système des relations étroitement tissées entre zones urbaines et rurales. Il y a, par exemple, diverses situations dans lesquelles les zones urbaines et rurales se rapportent les unes aux autres, comme dans le cas de la nourriture ou le tourisme.
D. La réponse « éducative »
La réponse éducative-environnementale passe par :
1. Au niveau écologique : la promotion des villes «durables», le soutien de l’agro-écologie, la préservation de la biodiversité, des « droits génétiques » des forêts, des zones humides, etc. ; le développement de la sécurité et la résistance des populations face aux effets induits par le changement climatique (aux catastrophes naturelles, aux problèmes d’instabilité hydrogéologiques, etc…).
2. Au niveau socio-économique: la promotion des modes de consommation et des réseaux directs entre consommateurs et producteurs qui permettent d’améliorer les conditions matérielles des populations rurales, encourager, lorsque cela est possible, la promotion de la multifonctionnalité des exploitations agricoles (qui peuvent aussi être des chambres d’hôtes, des fermes auberge, des agro-camping, des crèches, des agro-foyers pour personnes âgées, des fermes pour l’inclusion sociale des personnes défavorisées, des fermes sportives, des centres de bien-être « nature », etc.).
3. Au niveau culturel: la valorisation des connaissances locales, traditionnelles, indigènes et de la diversité culturelle, la valorisation de la culture et de l’image sociale de la population rurale, la promotion des relations équitables, solidaires, coopératives entre populations urbaines et rurales, la valorisation du rôle des femmes et les questions d’égalité des chances entre les sexes.
E. Les outils de l’Education
1. Promotion de modes de vie durables dans les villes.
2. Autonomisation (empowerment) et développement de capacités de création de projets (capacity building) par les populations urbaines afin de développer leur participation, la « créativité urbaine », les activités économiques « vertes », la coopération etc.
3. Faire du facteur « nourriture » un facteur de cohésion sociale urbaine (grâce à l’alimentation, des réseaux de citoyens peuvent se constituer par exemple, pour l’achat des produits directement auprès des agriculteurs, en contournant ainsi les longues chaînes intermédiaires, ou bien pour prendre en charge l’entretien des potagers et des jardins urbains et péri-urbains ou encore pour réfléchir à leur engagement en terme de consommation énergétique suite à des réflexions sur leurs modes de vie). La nourriture peut aussi être facteur de connexion ville-campagne (se rappeler que sans les processus naturels nous ne pouvons pas vivre, se souvenir de « qui » produit la nourriture que nous mangeons) aussi bien sur le plan des pratiques sociales et des relations économiques, que sur celui des schémas mentaux et des valeurs culturelles.
4. Eveil des consciences sur la relation entre l’environnement et la santé, sur l’importance d’une alimentation saine qui est le résultat de modes de vie sains et de pratiques agricoles et agro-industriels durables.
5. Développement de la sensibilité des décideurs et du grand public vis-à-vis de l’importance du paysage, de la nécessité de préserver les réserves foncières ; de la protection de l’environnement, de la valorisation des fonctions exercées par les populations rurales pour le bénéfice de tous.
6. Pour les communautés rurales, l’éducation signifie:
• mieux savoir défendre sa propre identité et accroître le sentiment d’estime de soi ;
• être en mesure de se réapproprier les techniques traditionnelles et les pratiques de collecte et de stockage de l’eau (pour les cultures et le bétail, pour l’entretien des forêts) ;
• savoir défendre ou revitaliser les pratiques de gestion des ressources communautaires (pâturages, forêts, eau, …);
• augmenter la capacité à développer des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement,
• établir des relations directes plus responsables et sensibles avec les marchés et le public, et établir des réseaux en créant un « système local » qui renforce les synergies locales et les coopérations entre les différents acteurs sociaux-économiques et culturels du territoire rural;
• apprendre à optimiser l’utilisation de méthodes biologiques de culture et d’élevage qui sont également respectueuses du bien-être animal, en plus de l’environnement;
• défendre sa propre santé et celle de l’environnement en évitant des pratiques agricoles nuisibles;
• développer de nouvelles activités et de nouvelles compétences, accompagner celles déjà existantes en prévoyant une transition vers une économie verte,
• offrir des nouvelles possibilités d’emplois en réponse aux activités vouées à disparaître lorsqu’elles sont incompatibles avec l’environnement;
• promouvoir l’égalité des sexes et plus globalement, rassembler l’objectif de développement respectueux de l’environnement et les objectifs de développement du Millénaire;
• développer la capacité à utiliser et produire de l’énergie à partir de sources renouvelables;
• diversifier les activités des exploitations agricoles;
• améliorer leur capacité à proposer un tourisme durable;
• développer leur capacité à participer à la vie politique de leur propre territoire.
F. Un large éventail de parties prenantes
Le thème se prête à inviter de nouvelles parties prenantes dans le WEEC (par exemple les ONG de coopération internationale, des organisations agricoles, les mouvements des paysans, les mouvements de la consommation alimentaire et responsables comme Slow Food et les divers réseaux de commerce équitable et de la consommation critique, etc.), de nouvelles institutions, à aborder de nouvelles thématiques.